Créer une fake news pour les (gros) nuls
Tuto : Créer une fake news pour les (gros) nuls
Vous trouvez que la vérité est trop ennuyeuse ? Vous pensez qu’un bon mensonge bien ficelé vaut mieux qu’un fait vérifié ? Félicitations, vous êtes prêts à rejoindre la grande famille de ceux qui inondent le web de fake news ! Pas besoin de talent, juste d’un peu de cynisme et d’une bonne connexion internet. Voici donc un guide (ironique, évidemment) pour apprendre à intoxiquer l’opinion publique comme un pro.
Choisissez un titre accrocheur
Le but d’une fake news est d’être massivement partagée afin qu’elle touche un maximum de personnes. Elle doit provoquer un engagement, une réaction émotionnelle forte : indignation, peur, espoir, colère… peu importe. Le but, c’est la viralité. Comme le disent les anglo-saxons, “A bad buzz is still a buzz” : « Une mauvaise publicité, c’est quand même une publicité ». Plus une fake news est répétée, même dans des versions légèrement différentes, plus elle finit par sembler crédible. Le simple fait de l’entendre souvent rend une information plus « vraie » à nos yeux.
Si elle soulève le débat, c’est encore mieux. Cela permet de multiplier les canaux de diffusion : indignés, sceptiques ou convaincus deviennent alors les ambassadeurs d’un même mensonge. On parle alors de mésinformation ; lorsqu’une personne relaye une fausse information sans savoir qu’elle est fausse. En revanche, si l’objectif est clairement de manipuler l’opinion (pour des raisons politiques, idéologiques ou financières), on entre dans le champ de la désinformation. Celle-ci peut être amplifiée artificiellement par des bots; (faux comptes automatisés) qui assurent sa diffusion constante. Et oui : l’indignation se partage très bien, même quand elle est complètement bidon.
Une fake news efficace : mélangez vérités partielles et gros raccourcis
La première règle d’or d’une bonne fake news, c’est qu’elle doit être crédible. Et quoi de plus crédible qu’un petit bout de vérité ? Utilisez des données authentiques mais sorties de leur contexte, tronquées ou détournées.
Un grand classique : la photo manipulée. Prenez une image qui illustre votre idée. Supprimez sa légende, détachez-la de son contexte original, postez-la au bon moment… et le tour est joué. Par exemple, une photo de foule immense pourra être utilisée pour gonfler la portée d’une manifestation, même si elle date d’un autre événement ou même d’un autre pays.
Ajoutez à cela un bon cherry picking : sélectionnez uniquement les données ou extraits qui servent votre propos en ignorant volontairement tout le reste. Cela donne une illusion de rigueur, alors que la démonstration est complètement biaisée. Bonus : plus c’est technique, moins on vous contredira. Rien de tel qu’un graphique tronqué, un chiffre déconnecté de sa méthodologie, ou un « selon une étude » non sourcé pour bluffer l’auditoire.
❌ Petit point faible de cette technique : une simple recherche inversée d’image permet parfois de démasquer la supercherie. Mais rassurez-vous, peu de gens prennent le temps de le faire.
Le biais d’autorité : votre meilleur complice
N’oubliez pas d’invoquer le biais d’autorité : attribuez votre fake news à une personnalité influente ou un « expert » auto-proclamé. Plus le titre est pompeux, plus l’effet est garanti. Vous pouvez même inventer une citation, l’associer à une photo de quelqu’un en costume, et la faire circuler comme parole d’Évangile.
Les plateaux télés regorgent de ces « toutologues », des intervenants omniprésents, s’exprimant sur tous les sujets avec un aplomb confondant. Ils manient le jargon pseudo-scientifique comme personne et citent des « études » sans jamais donner leurs sources. Parfois, une blouse blanche, un graphique flou ou un jargon savamment obscur suffisent à donner une illusion de vérité.
Les outils modernes de la post-vérité
Les technologies récentes sont vos alliées. Les IA génératives permettent de créer en quelques secondes une image ou un texte de toutes pièces. Certains indices, comme des anomalies dans les mains ou les yeux des sujets, permettent parfois de les repérer… mais cela demande un regard aguerri. Et franchement, qui zoome sur des doigts ?
Plus spectaculaire encore : les deepfakes (ou hypertrucages). En manipulant à la fois l’image et le son, ces outils permettent de faire dire n’importe quoi à n’importe qui dans une vidéo apparemment authentique. On les retrouve dans des opérations de manipulation politique, de déstabilisation, ou même d’extorsion. De quoi donner des sueurs froides à tous les journalistes du monde.
Petit rappel utile
Créer ou partager délibérément une fake news peut avoir de véritables conséquences. En France, cela peut même être puni par la loi si le média en question a une audience significative (plus de 5 millions de visiteurs uniques par mois) ou si la campagne est sponsorisée au-delà de 100 € HT.