MicroCO₂sme
Pour que les récifs d’huîtres ne soient jamais à plat
Pourquoi MicroCO₂sme ?
La star de ce projet, c’est l’huître. Et pas n’importe laquelle, l’huître plate, Ostrea edulis de son petit nom latin ou la Belon pour les locaux. Les scientifiques de ce projet s’intéressent à elle car cette espèce qui peuplait autrefois tous les littoraux européens a quasiment disparu. Imaginez 30 secondes, la rade de Brest il y a 180 ans. Il fait 25°C, le temps est ensoleillé… C’est faux, il devait surement faire 12°C, mais “quand même, on devrait avoir de superbes éclaircies”. Le port est en ébullition, ce ne sont pas moins de 300 équipages qui s’affairent pour partir “pêcher” de l’huître plate. À l’époque les ostréiculteurs n’existaient pas. On ne cultivait pas l’huître, on la récoltait. Le fond de la rade était dragué par des bateaux à voile pour remonter les précieux bivalves qui peuplaient cette zone. De cette manière, c’est 8 à 9 millions d’huîtres qui étaient vendues chaque année. Il faut imaginer que les huîtres étaient tellement nombreuses qu’on les trouvait sous forme de récifs. C’étaient un peu nos récifs coralliens Bretons. En plus jolis. Les huîtres plus jeunes se fixant sur les plus vieilles, ce sont de grosses structures en 3 dimensions qui étaient présentes au fond de l’eau. Des structures tellement communes qu’on appelait ces zones des huîtrières. Terme disparu avec les derniers récifs.
Aujourd’hui, de nombreux efforts ont été faits en France et en Europe pour restaurer et protéger ces récifs. Cependant, dans le contexte des changements globaux et considérant l’augmentation des pollutions dans les milieux côtiers, notamment les microplastiques qui affectent les bivalves, on peut se demander si ces mesures ne seront pas vaines…
Carte d’identité de l’huître plate
Nom & famille
Huître plate (Ostrea edulis) – Mollusque
Habitat
Zone subtidale, là où la marée ne se retire jamais
Alimentation
Les huîtres sont des filtreurs. Elles mangent des microalgues planctoniques qu’elles filtrent à travers leurs branchies
Comportement
Grégaire, elles se fixent les unes sur les autres pour former des récifs
La démarche scientifique de Microco₂sme
De nombreux efforts de repeuplement et de protections des bancs d’huîtres plates sont menés au travers de toute l’Europe. Cependant, les paramètres physicochimiques des eaux côtières évoluent. L’océan s’acidifie et devient plus chaud à cause des changements climatiques . Pour un organisme calcifiant et ectotherme (qui ne peut pas réguler sa température corporelle), cela peut avoir des conséquences majeures. D’autant plus que s’ajoute à ces effets la pollution, dont les microplastiques, qui constituent un stresseur en plus pour les huîtres.
Les chercheurs se demandent si le changement climatique et la pollution plastique pourraient affaiblir les huîtres, réduisant à néant les efforts menés pour restaurer les récifs.
Un total de 12 aquariums a été installé à Océanolab, représentant quatre environnements testés et répétés chacun trois fois pour assurer la robustesse de l’étude :
- La rade de Brest actuelle (température et pH actuels, pas de pollution plastique) = Condition contrôle
- Les conditions climatiques de 2100 de la rade de Brest (+2°C, -0.3 unités de pH) = Condition changements climatiques
- Pollution plastique de 2100 dans la rade de Brest actuelle (température et pH actuels, pollution plastiques) = Condition plastique
- Les conditions climatiques et la pollution plastique de 2100 de la rade de Brest (+2°C, -0.3 unités de pH, pollution plastique) = Condition multistress
Au total, 25 huîtres d’élevage, 3 sauvages et leurs espèces associées (crabes, vers, éponges, etc.) sont placées dans un aquarium de 250 litres. La température et le pH suivent l’évolution saisonnière naturelle de la rade de Brest.
De nombreuses données ont été recueillies durant l’année: Mortalité, longueur de télomères, taux de respiration et d’alimentation, richesse de biodiversité, accumulation de dérivés de plastiques et bien d’autres!
Toutes ces données sont compilées, tracées sous forme de graphiques et analysées par des tests statistiques pour obtenir une idée claire de la réponse des huîtres en fonction de leurs conditions expérimentales.
Travail en cours !
La science est un processus long. Parfois les expérimentations et prélèvements prennent du temps, dans certains projets ce sont les analyses biologiques, pour d’autres ce sont les analyses de données. Pour le projet Microco₂sme, c’est un peu tout en même temps. Les résultats arrivent au compte goutte et c’est une fois tous les résultats mis ensemble que le puzzle peut être interprété.
Au vue de l’interprétation faite des résultats, l’hypothèse peut être validée ou réfutée. Encore quelques temps à attendre avant de découvrir la conclusion de MicroCO₂sme…