Une première réussie !
Nous y sommes, le projet BLIC est bel et bien lancé. La première expérience s’est même terminée le 29 avril sous les yeux de 5000 premiers visiteurs. Retour sur ces 3 premières semaines d’expérience.

À la pêche au phytoplancton !
Après une stérilisation des aquariums permettant de limiter une potentielle contamination qui pourrait fausser les résultats de l’expérience, Laura et Maëva partent à la pêche. C’est à côté d’Océanopolis, devant une petite plage que les 2 ingénieures de recherches prélèvent 20L d’eau de mer. Cette zone a été identifiée comme étant assez représentative des espèces que l’on peut retrouver en rade de Brest et à la fois pas directement en contact avec des eaux qui peuvent être polluées par l’homme. De retour au labo, l’eau de mer échantillonnée est passée sur un filet d’une maille de 200 µm pour éliminer les prédateurs du phytoplancton. les deux ingénieures de recherche prélèvent à la marina du Moulin Blanc 20L d’eau de mer concentrés en phytoplancton.

Laura
« À cette époque de l’année on s’attend plutôt à observer des grosses espèces de phytoplancton. Et c’est ce que l’on a pu voir avec des Cerataulina sp. et des Rhizosolenia sp., des diatomées d’une centaine de micromètres qui se construisent une carapace en verre »
Au printemps, l’océan est aussi en fleur
Comme dans le domaine terrestre, les végétaux se développent aussi en grandes quantités dans l’océan. C’est même le meilleur moment de l’année pour observer des blooms qui peuvent parfois colorer les eaux et même être visibles depuis l’espace. La raison ? Une association de conditions très favorables pour les végétaux marins et donc le phytoplancton. En effet, à ce moment de l’année la température de l’eau commence à remonter et les jours rallongent. Mais plus que ces deux dernières raisons, c’est surtout la concentration en nutriments présents dans l’eau qui permet aux algues de se développer. Les pluies, qui intensifient le ruissellement des eaux jusqu’à l’océan, déversent de la matière organique riche en nutriments dans les eaux côtières. Ces trois facteurs associés induisent au printemps une explosion de biodiversité phytoplanctonique qui sera le déclenchement du cycle de vie d’autres espèces planctonophages.
À vos marques, prêts ? Poussez !
De retour au laboratoire, le phytoplancton est dilué pour obtenir des populations très diversifiées et d’autres beaucoup moins. Ces groupes réalisés sont ensuite mis en culture pour observer leur développement.
Chaque jour les scientifiques de BLIC se relaient pour suivre attentivement les cultures jusqu’à ce que le bloom soit atteint. Comment en être sûr ? Les espèces phytoplanctoniques arrêtent de se multiplier et la concentration en nutriments cesse de diminuer. La culture atteint un plateau.
Dans les 24 aquariums étudiés, c’est donc des mesures de fluorescence qui sont faites chaque jour avec un AquaPen. Cet appareil relève, dans le noir complet, une estimation de la quantité de phytoplancton présente dans un échantillon d’eau et permet aussi de connaître « l’état de santé » des cellules réalisant la photosynthèse.

Un premier essai réussi ?
« Cette première expérience était vraiment importante pour nous car elle allait nous permettre de jauger la durée qu’il allait falloir à notre phytoplancton pour se développer et donc pour former un bloom. »
Alors Laura, ça bloome ?
« Et bien ça bloome pas mal ! On a donc pu voir que cela a pris entre 15 et 20 jours suivant les aquariums pour que le bloom atteigne sa phase de plateau. C’était globalement ce à quoi on s’attendait. Donc on est rassurés pour la suite des expériences même si on pourrait avoir des surprises selon les saisons.
Nous avons retrouvé de nombreuses espèces dont certaines attendues comme Pseudo-Nitzschia, une diatomée qui synthétise des toxines amnésiantes ou d’autres qui étaient là en grande quantité comme des Chaetoceros.
Ce qui nous rassure beaucoup sur notre protocole expérimental c’est que les dilutions que nous avons mis en œuvre pour étudier les différentes richesses de population fonctionnent très bien. Nous avons remarqué que le bloom mettait plus longtemps à atteindre sa phase de plateau lorsque les populations en culture étaient moins riches en espèces. »
Et le zooplancton ?
La deuxième problématique du projet BLIC consiste à étudier l’effet de prédation du zooplancton sur les cultures de phytoplancton. Après une nouvelle session pêche, mais avec une maille plus grosse cette fois-ci, du zooplancton a été ajouté à la moitié des aquariums d’Océanolab pour voir comment le développement des blooms allait être affecté. À cette époque de l’année, le zooplancton n’est pas encore très diversifié. On y retrouve principalement des petits crustacés appelés copépodes, les cyclopes des mers présents dans l’eau toute l’année.
Des premiers résultats ?
« Nous avons pu observer le pouvoir de contrôle du zooplancton sur les populations de phytoplancton. Maintenant, il faut examiner en détail quelles espèces ont été les plus affectées et lesquelles ont réussi à échapper à l’appétit vorace des copépodes.
Nous avons amassé une belle quantité d’échantillons ! Aux moments clés de l’expérience, c’est à dire au début, au pic du bloom puis durant sa décroissance, nous avons prélevé de l’eau pour dénombrer et identifier sous le microscope chaque espèce présente. C’est assez fastidieux mais ce sera vraiment le résultat le plus important de cette expérience.
Maéva, de son côté, a mesuré l’évolution des nutriments présents dans l’eau comme l’azote, le phosphore et la silice. Elle s’est aussi intéressée à des particules produites lors d’une efflorescence algale. Ces particules chimiques sont les précurseurs d’un processus encore pas très bien compris : la formation de la « neige marine », ce phénomène qui fait « tomber » au fond des océans de la matière organique. »
Le temps de répondre aux dernières questions des visiteurs, de refermer le congélateur bien rempli d’échantillons et de rincer les aquariums, il est déjà l’heure de lancer une nouvelle expérience !
Un public conquis
Passé le premier regard plutôt circonspect des visiteurs découvrant les aquariums d’Océanolab vaguement colorés ; la scénographie, l’enthousiasme des médiateurs et l’accueil des scientifiques a permis de rendre visible et divertissant le plancton. Les 5000 premiers visiteurs qui ont découvert l’espace pendant cette première expérience sont ressortis émerveillés devant la diversité de formes, de couleurs et de moyens de se mouvoir de ces si petites bêtes.
Un véritable moyen de changer leur regard sur l’océan et de prendre conscience de la complexité du monde qui les entoure.